Read Master of the Crossroads Online
Authors: Madison Smartt Bell
Tags: #Haiti - History - Revolution, #Historical, #Biographical, #Biographical fiction, #General, #Literary, #Historical fiction, #Toussaint Louverture, #Slave insurrections, #1791-1804, #Haiti, #Fiction
Votre lettre datée du
20
Brumaire de l’an
3
de la République me fait connaître les nobles sentiments avec lesquels vous l’avez dictée; elle commence
avec le mépris que tous vous autres auraient toujours pour les gens de ma race.
J’ay l’honneur d’être nommé général parmis mes amis et mes ennemis, titre glorieux que je me suis acquis par mes explois, ma bonne conduite, ma probité et
mon courage et vous me privez de cet honneur dans la première parole de votre
lettre, en me nommant avec un air dédaigneux et méprisant Jean-François,
comme vous pourriez faire dans ces temps malheureux où votre orgueil et votre
cruauté nous confondaient avec les chevaux, les bêtes à cornes et les plus viles
animaux, précisément dans une occasion où vous avez besoin de moi, et vous
me proposé la perfidie la plus noire que vous cherchez à embellir avec des
promesses séduisantes, menteuses et remplies d’artifices, et par lesquelles vous
faites connaître l’indigne idée que vous avez de mon caractère et mon procédé.
Mon parti est pris, et je suis inébranlable une fois déterminé, je vivrai, je
mourrai dans la belle cause que j’ai adoptée, et sans lâcher de faire l’apologie
de Messieurs les Espagnols, je pourrai vous prouver que je n’ai que des
louanges à faire d’eux les ayant toujours trouvés fidèles et religieux observateurs dans toutes leurs promesses.
Quoique je pourrai bien répondre à tous les chapitres de votre lettre, je les
omets parce qu’ils sont presque tous détaillés dans un manifest que j’ai fait circuler à mes compatriotes dans lequel je leur fais connaître sans artifice, le sort
que les attend, s’ils se laissent séduire par vos belles paroles . . . l’Egalité, la
Liberté, &c &c &c . . . et seulement je croirai à celuy là jusqu’à ce que je vois
que Monsieur Laveaux et d’autres messieurs français de sa qualité, accordent
leur filles en mariage aux nègres. Alors je pourrai croire à l’égalité prétendue. Il
ne me reste plus monsieur le général, que de vous demander la grâce de m’envoyer cette lettre de monsieur le Président que vous citez dans d’autres écrits
que sont entre mes mains, dans laquelle il vous promet ma tête pour la rançon
de tous les prisonniers espagnols, de vous prier de faire la guerre, en respectant
les droits des gens et cette générosité observée anciennement par les noble guerriers français dont vous trouverez bien des exemples dans vos illustres ancêtres,
et de vous instruire que jamais la trahison et la perfidie ne seraient le partage
du général Jean-François.
Jean-François, Général de S.M.C.
10
FROM CHAPTER 17
Vous demandez si un républicain est libre? Il faut être esclave pour faire
une pareille demande. Osez-vous bien, vous Jean-François, qui avez vendu à
l’Espagnol vos frères, qui actuellement fouillent les mines de cette détestable
nation, pour fournir à l’ostentation de son roi....
11
Toussaint-Louverture à tous ses frères et soeurs actuellement aux Verrettes.
22
mars
1795
Frères et soeurs,
Le moment est arrivé où le voile épais qui obscursissait la lumière doit
tomber. On ne doit plus oublier les décrets de la Convention nationale. Ses
principes, son amour pour la liberté sont invariables, et désormais il ne peut
pas exister d’espoir de l’écroulement de cet édifice sacré. . . .
Art 6.—Le travail est nécessaire, c’est une vertu; c’est le bien général de l’Etat.
Tout homme oisif et errant sera arrêté pour être puni par la loi. Mais le service
aussi est conditionné et ce n’est que par une récompense, un salaire justement
payé, qu’on peut l’encourager et le porter au suprême degré....
12
FROM CHAPTER 19
Verrettes, le
23
pluvi ôse, l’an IV de la République française (
12
février
1796
)
Mon cher frère et ami,
Je vous envoie trois de mes officiers, pour vous porter un paquet que le
général et gouverneur de Saint Domingue me charge de vous faire parvenir.
Malgré que je n’ai pas le plaisir de vous connaître, je sais que, comme moi,
vous portez les armes pour la défense de nos droits, pour la liberté générale; que
nos amis les commissaires civils Polverel et Sonthonax avaient la plus grande
confiance en vous, parce que vous étiez un vrai républicain. Aussi je ne puis
croire aux bruits injurieux que l’on fait courir sur vous: que vous avez abandonné votre patrie, pour vous coaliser avec les Anglais, ennemis jurés de notre
liberté et égalité.
Serait ce possible, mon cher ami, qu’au moment où la France triomphe de
tous les royalistes et nous reconnaît pour ses enfants, par son décret bienfaisant
du 9 thermidor, qu’elle nous accorde tous nos droits pour lesquels nous nous
battons, que vous vous laisseriez tromper par nos anciens tyrans, qui ne se servent d’une partie de nos malheureux frères que pour charger les autres de
chaînes? Les Espagnols, pendant un temps, m’avaient de même fasciné les
yeux, mais je n’ai pas tardé à reconnaître leur scélératesse; je les ai abandonnés
et les ai bien battus; j’ai retourné à ma patrie qui m’a reçu à bras ouverts et a
bien voulu récompenser mes services. Je vous engage, mon cher frère, de suivre
mon exemple. Si quelque raisons particulières, vous empèchaient d’avoir la
confiance dans les généraux de brigade Rigaud et Beauvais, le gouverneur
Laveaux, qui est notre bon père à tous, et en qui notre mère patrie a mis sa
confiance, dois aussi mériter la vôtre. Je pense que vous ne me la refuserez pas
aussi à moi, qui suis un noir comme vous, et qui vous assure que je ne désire
autre chose dans le monde que de vous voir heureux, vous et tous nos frères.
Pour moi, je crois que nous ne pouvons l’être qu’en servant la République
française; c’est sous ses drapeaux que nous sommes vraiment libres et égaux. Je
vois comme cela, mon cher ami, et je ne crois pas me tromper. S’il m’avait été
possible de vous aller voir, j’aurais eu le plaisir de vous embrasser, et je me flatte
que vous ne m’auriez pas refusé votre amitié. Vous pouvez vous en rapporter à
ce que vous diront mes trois officiers; ce sera la vérité. Si, quand ils reviendront, vous voulez m’envoyer deux ou trois des vôtres, nous causerons ensemble, et je suis sûr que je leur donnerai de si bonnes raisons, qu’ils vous
ouvriront les yeux. S’il est possible que les Anglais aient réussi à vous tromper,
croyez-moi, mon cher frère, abandonnez-les, réunissez-vous aux bon républicains, et tous ensemble chassons ces royalistes de notre pays: ce sont des
scélérats que veulent nous charger encore de ces fers honteux que nous avons
eu tant de peine à briser. Malgré tout ce qu’on m’a dit de vous, je ne doute
point que vous soyez un bon républicain: ainsi vous devez être uni avec les
généraux Rigaud et Beauvais qui sont de bons républicains, puisque notre
patrie les a récompensés de leurs services. Quand même vous avez quelques
petites tracasseries ensemble, vous ne devez pas vous battre contre eux, parce
que la République, qui est notre mère à tous, ne veut pas que nous nous
battions contre nos frères. D’ailleurs, c’est toujours le pauvre peuple que en
souffre le plus. Quand nous, chefs, nous avons des disputes entre nous, nous
ne devons pas faire battre les soldats qui nous sont confiés les uns contre les
autres, mais nous devons nous adresser à nos supérieurs qui sont faits pour
nous rendre justice et pour nous mettre d’accord. Rappelez-vous, mon cher
ami, que la République française est une et indivisible, que c’est ce qui fait sa
force et qu’elle a vaincu tous ses ennemis. . . .
Croyez-moi, mon cher ami, oubliez toute animosité particulière; réconciliez vous avec nos frères Rigaud et Beauvais; ce sont de braves défenseurs de
la liberté générale, qui aiment trop leur patrie pour ne pas désirer de tout leur
coeur d’être vos amis, ainsi que tout le peuple que vous commandez.
Malgré que je n’ai pas l’avantage de connaître le commandant Pompée, je
vous prie de lui présenter mes civilités.
Je vous embrasse et vous salue en la patrie, vous et tous nos bons frères.
Toussaint-Louverture
13
FROM CHAPTER 19
Paris, 22 fructidor an X (9 septembre 1802)
Vous voudrez bien vous rendre au château de Joux.
Vous y ferez une enquête pour savoir comment Dandigné et Suzannet se
sont échappés. Vous verrez Toussaint, qui m’a fait écrire par le ministre de la
Guerre qu’il avait des choses importantes à me communiquer. En causant avec
lui, vous lui ferez connaître l’énormité du crime dont il s’est rendu coupable en
portant les armes contre la République; que nous l’avions considéré comme
rebelle dès l’instant qu’il avait publié sa constitution; que d’ailleurs le traité
avec la régence de la Jamaîque et l’Angleterre nous avait été communiqué par
la cour de Londres; vous tâcherez de recueiller tout ce qu’il pourra vous dire
sur ces differents objets, ainsi que sur l’existence de ses trésors et les nouvelles
politiques qu’il pourraint avoir à vous dire.
Vous ne manquerez pas de lui faire connaître que, désormais, lui ne peut
rien espérer que par le mérite qu’il acquerrait en révélant au Gouvernement
des chose importantes, et qu’il a intérêt à connaître.
Vous recommanderez qu’on ne se relâche en rien de la garde sévère qu’on
doit faire pour empêcher qu’un homme comme lui se sauve.
Bonaparte
14
FROM CHAPTER 19
On m’a envoyé en France nu comme un ver; on a saisi mes proprietés et mes
papiers; on a répandu les calomnies les plus atroces sur mon compte. N’est-ce
pas couper les jambes à quelqu’un et lui ordonner à marcher? N’est-ce pas lui
couper la langue et lui dire de parler? N’est-ce pas enterrer un homme tout
vivant?
15
FROM CHAPTER 24
6
Messidor, an
4
e
Par une de mes dernières lettres, cher général, je vous ai prévenu que vos
enfans pourraient partir pour France sur le vaisseau de soixante-et-quatorze, le
Watigny; comme nous devons le faire partir très prochainement, je vous prie de
me les envoyer de suite; ils seront logés chez moi, j’aurai pour eux tous les soins
de l’amitié jusqu’à leur départ. Vous pouvez compter sur toutes mes sollicitudes, sur celles du général Laveaux pour qu’en France on les elève de manière
à répondre à vos vues. Soyez sûr que le ministre de la Marine, mon ami particulier, leur prodiguera tous les secours de la République. . . .
Sonthonax
16
FROM CHAPTER 24
Quartier Général des Cahos, le
30
thermidor, l’an
4
de la République
française, une et indivisible (
17
avril
1796)